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Regarde ce qui te fait mal,
écoute ce qui te déchire,
appelle ce qui se dérobe,
épelle qui t'analphabète,
apprivoise qui t'ensauvage,
parle depuis ton secret...
Tu ne peux penser qu'en plus grand,
ce que tu dis disproportionne.
Tu respires un air bien plus vaste,
un air bien plus respirable.
Dessine ce qu'on ne voit pas,
appelles-en à ton silence,
perçois le plus haut en toi,
délire en des sens indécents.
Préfère l’incandescence.
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(éloge de Gérard de Nerval, poète)« C'est la Mort - ou la Morte... Ô délice ! ô tourment !La rose qu'elle tient, c'est la Rose trémière. »« Artémis »« Je suis venue te dire que je t’aimais, Gérard, toi qui es mort tout seul, tout entouré de tes amis fidèles, tellement inutiles avec leur pauvre fidélité. C’est que tu étais seul, plus seul qu’eux tous, dans cette solitude terrible de ceux qui ont affaire aux Morts. Toi, tu parlais avec la mort, ou bien plutôt « la Morte », celle qui t’avait confié à son frère avant de partir avec son mari, ton père. Pourquoi t’avait-elle confié ? Parce qu’elle ne voulait pas LE laisser partir seul ? Parce qu’elle l’aimait plus que tout, plus que toi ? Parce qu’elle avait envie de vivre ? Son frère, ton oncle, quand tu lui demandais « Où est maman », te répondait : « Elle va venir, elle va revenir. Elle pense à toi. » Et puis, il te disait qu’elle était belle, qu’elle était vive, qu’elle aimait vivre, trop, il te racontait quand ils étaient petits tous les deux, comme toi, qu’elle était libre, libre, et qu’elle aimait nager et fouler les chemins. Ainsi vivait-elle avec toi, et en toi. Et puis, un jour, ton père est revenu. Mal rasé, mal coiffé, maigre et sale. Un vagabond. Seul.-« Maman ? »-« Maman, elle est avec les anges, elle est restée là-haut, elle est plus heureuse en un séjour plus beau. »Maman n’était pas morte, elle n’avait pu mourir, elle vivait ailleurs, parmi d’autres ombres et lumières, dans le ciel. Mais elle était la proie d’Horus et de Napoléon, de toutes ces figures imaginaires et mythiques, complices du Père ravisseur. Elle protégeait Antéros qui venait la sauver et n’y arrivait pas.Mais toi, toi le petit enfant que tu es à jamais resté, tu étais le Déshérité, le Ténébreux, le Veuf, l’Inconsolé, l’inconsolable à tout jamais, la Mélancolie seule t’éclairait de son soleil noir et tu vivais en un théâtre d’ombres. Tu voulais à la fois en sortir, y rester, tu n’en finissais pas de « sortir d’un théâtre », mais en un imparfait si lent, si ralenti que tu ne pouvais pas finir, que tu n’en finirais jamais d’en sortir de ce théâtre sombre, en un accouchement presque impossible et pour jamais inachevé.C’est pourquoi tu t’es demandé, et moi avec toi, « s’il vit », ce poète que tu es, s’il bat son cœur.« Je pense à toi, Myrtho, divine enchanteresse(…) C’est dans ta bouche aussi que j’avais bu l’ivresse »Il y a comme une vitre entre elles et toi, ces filles vives et brûlantes, tu ne sais pas leur dire, ni comment, que tu es mort déjà. Tu voudrais leur parler comme à des mortes. Tu les aimes comme la mort. Les aimer ? Tu ne le peux pas. Ce serait trahir.« La Treizième revient, c’est encor la première »Tu leur fais peur, tu les effraie, elles lisent en tes yeux que tu ne les vois pas, que tu ne peux les voir, pas encore. Tu sors d’un théâtre, tu n’en finis pas d’en sortir, elles le sentent, elles le savent tes amoureuses, quand elles te caressent la main, elles sentent trop bien que tu es vaporeux. T’attendre ? Elles ne peuvent pas. Ce que tu as à vivre surpasse le temps qui t’est compté.J’aurais aimé pourtant devenir l’une d’elles et te parler, te rassurer, te caresser, te faire advenir à toi-même. Je t’aurais dit : « Regarde-moi, j’arrive du futur pour toi. Je te suis jeune, infiniment. J’ai entendu tes poèmes, ces poèmes d’amour jetés au ciel, j’entends que c’est pour moi que tu les dis, ces mots d’amour à l’infini. Je suis l’Infinie que tu cherches. Et je suis toi plus que toi-même, je t’aime... »(...)Je suis sûre, pourtant, que tu m’as entendue ce soir-là, le dernier, dans la rue de la Vieille Lanterne. »
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IDans le silence de la nuitpetite halte.Comme le train s’arrêteen pleine voie.Calme réveil, très doux.Peu d'étoiles.Il fait un froid qui caresse,dehors, à peineun froid.Tout va,je passe,la nuit est là.Je respireet le mondeaussi.Rien de notable saufceci:Je viens d'émerger du sommeil,je vois couler la nuit.Je n’ai pas su ce qui m’éveille.IIJe me dis parfois que Daesh,c'est de vouloir qu'enfinle désert gagne...Comme ces enfants comblés de cadeauxqui les négligent,les détruisent,préfèreraientn'avoir rien reçu.Nous avons trop. Saufde l’amour.Il était une fois un patrimoinesi grand, si ancien,si encombrantqu'il prenaittoute la placedans la tête etsur la terre.Il a falluqu'un vent,une très grand ventcomme une main la tablevienne tout bannir, tout balayer.Faire exploser les Bouddhasde Damian,et beaucoup de Kamikaze...Le Daesh que je conte,c'est un Daesh pour les bébés,pour les fées etpour les enfantsqui gazouillent, mais pas seulement.C'est aussi un Daeshpour les Grands.Ceux qui préfèrent avoir toutperdu, tout détruitplutôt que d’être réduitsà mendier.Mais ce que je dis tremble ets'efface en se disant."Passez, passez" me disent les instants.“Circulez, il n’y a rien à voir,les statues seront aboliesainsi que toutes les traces.Demain ou même aujourd’hui.”IIIFenêtres ouvertes sur vos vies.Merci de vos lumières,pour les guirlandes, les bougies,la couleur de vos yeux,ou celles de vos rêves.Nous respirons même air.La même eau nous réjouit.Et je visite vos voyages,vos fêtes, vos familles,je marche en vos intimitésen me disant que nous sommesdes frères,lointains mais des frères, des sœurs.Pourtant.Il y a ce silence,je l'entends.Il craque doucementcomme un feu flambe,entouré d'une nuit comble d'étoiles.IVUn mot ne coûtepresque rien à posersur la page.A peineune larme de temps.Aussi,pose tes motsl'un après l'autrecomme la pluie se pose,goutte à goutte.Mouille ta vie de ta mémoire.N’oublie surtout pasde pleurer.
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