• Apprenez-moi Bouddha, je dirai oui,
    Mahomet ou Vichnou, je dirai oui.
    Apprenez-moi Jésus, je dirai oui
    à ce qu'ont raconté les sages.

    Apprenez-moi Lautréamont, je dirai oui,
    Rimbaud, Artaud, je dirai oui,
    Nietzsche ou Michaux, je dirai oui
    à ce qu'ont raconté les fous.

    Apprenez-moi Zeno Bianu, Yves Bonnefoy,
    Umberto Eco et Jean-Michel Maulpoix,
    Jacques Rancière ou bien Bourdieu
    je dis oui aux savants brûlants,

    Apprenez-moi Angelica Liddell,
    Sapho, Dora et Louise Labé,
    apprenez-moi Juliette et Barbara,
    je dis oui à ces voix de femmes.

    Oui, j'ai soif de toutes ces voix,
    j'ai faim de ces éclats de rire,
    de ces sanglots, de ces crachats.
    Et je veux croire en tout cela.

    Apprenez-moi la marguerite,
    les rayons du soleil, le bois,
    comment nuit et jour font l'amour,
    et comment caresser les pierres.

    Je ne suis qu'un homme de peu,
    de peu de temps, de peu de voix,
    de peu de sens et peu de loi
    mais j'aime aimer ce qui est là.

    Comment tout embrasser,
    tout serrer dans mes bras?
    Apprenez-moi, apprenez-moi
    la lumière et l'obscurité.

    Entendre parler ce qui vient,
    ce qui semble n'être plus là
    et qui pourtant demeure et tient,
    et voir changer ce qui devient.

    Et toi, apprends-moi ta caresse,
    apprends-moi le goût de ta peau,
    le parfum de tes plis, l'ivresse
    de perdre le sens et les mots

    quand tu me prends et quand tu poses
    ta main sur mon cœur et mes bras,
    quand tu me chuchotes des choses
    qui me vibrent de haut en bas.


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  • Ils ne pensaient point

     Ils étaient pensés

     Ils ne parlaient point

     Ils étaient parlés

     Ils ne disaient point

     D'autres les disaient

     Ils ne vivaient point

     D'autres les vivaient.

     

    Ils étaient des points

     Rien que des objets

     Ils étaient des biens

     Qu'on manipulait.

     D'autres leur parlaient

     D'autres leur disaient,

     D'autres les pensaient.

     Et ils n'étaient rien.

     


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  • Je racontais à mes "Petits" des choses très bizarres au son de l'orgue. Les Chorals du "Petit livre d'orgue" (pas si petit que ça) de J.S. Bach sont brefs et les couleurs qu'ils prennent, les uns après les autres, très variées (j'en ai moi-même travaillé quelques uns en tant qu'organiste). Alors, j'inventais des récits, me laissant porter de choral en choral ; des histoires burlesques ou rêveuses, ou plutôt, les multiples épisodes d'une même histoire... C'est que l'orgue, c'est sensuel "en diable", si je puis dire, c'est parfois céleste et parfois très cru, parfois très doux et chuchotant, parfois violent ou irritant. Une grosse anche, et voilà "Gros Cucul" qui apparaissait, monstre noir et hideux, porteur d'orages et de cataclysmes. Au contraire, une voix céleste ou humaine avec un beau tremblant, et c'était Pégase l'ailé qui portait les deux enfants...
    Mais j'entendais que c'était moi qui les portais, mes deux Petits, quand je contais ces histoires païennes, au son de l'orgue. Je les portais dans cet amnios de la musique et de ma voix, mais aussi je les portais vers l'âge adulte... Comme une traversée sur l'océan de la musique et de la vie. J'étais le guide et rassurais quand l'orgue faisait peur et devenait un ogre, ou bien nous évitions des chausses-trappes que j'avais moi-même creusées... Ou nous glissions ensemble et apaisés sur les divines mares douces ou les rivières paresseuses que la liquidité de la musique faisait naître sous les planches courbées de la coque. Nous écoutions tous trois leurs clapotis d’éternité.

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  • Je me suis mis tout nu,
    dans le silence
    et en silence.
    J'ai quatorze ans,
    le désir de la terre.
    Je me suis allongé
    entre les grands maïs,
    la terre, froide et grumeleuse
    dans le dos,
    me suis cambré.
    L'urine chaude a coulé
    depuis mon sexe
    sur mon ventre, mon torse et jusqu'au cou,
    et je me suis lavé
    à sa chaleur,
    à son odeur de bête.
    La terre s'est assouplie,
    sous moi, autour de moi,
    tout grossissait de moi et je ne savais
    pas où j'allais.
    Je me suis badigeonné d'humus
    et c'était ocre et doux, enivrant comme la vie qui vient.


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  • Trop dur dehors,
    trop fragile
    dedans.
    Je n'entends pas,
    n'écoute rien,
    je fais semblant.
    J'essaie de vivre
    étanche,
    c'est douloureux
    cette carapace
    qui voudrait
    protéger de la vie.


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